Tunisie : le Front populaire et les élections

Depuis l’assassinat de Chokri Belaïd en février 2013, des désaccords se sont exprimés au sein du Front Populaire tunisien (FP) sur l’orientation à choisir pour lutter contre les différentes faces de la réaction : l’islamisme d’un côté, la droite héritière du régime de Ben Ali de l’autre. Récemment, des militants du Front populaire tunisien en région parisienne ont publié la déclaration de rupture que nous reproduisons ici, dénonçant notamment l’alliance du FP avec la bourgeoisie dans le cadre du Front de salut national, mais aussi les illusions véhiculées par les directions du FP sur les élections législatives qui se sont déroulée le 26 octobre et les élections présidentielles qui vont suivre (fin novembre et début décembre).

En effet, les élections législatives se sont déroulées dans un climat où les luttes sociales étaient oubliées de tous les candidats, ceux du FP compris, mais aussi dans un climat de peur des attentats terroristes, alimentée et entretenue par les principaux médias tunisiens. Les résultats donnent quelques éclairages intéressants : la participation est encore plus faible qu’en 2011 (43 % en 2014 contre 49 %, pourcentages calculés sur la base de la population en âge de voter), le FP a eu moins de voix que ses différentes composantes en 2011, et l’assemblée nationale qui sort de ces élections sera composée à 92 % d’élus des droites diverses. Autant dire que la politique économique en faveur des plus riches sera poursuivie avec encore plus d’arrogance, et au nom de la « démocratie » tant saluée par les puissances impérialistes, qui ont surveillé de près ces élections. Et la première loi que tous les candidats se sont engagés à voter est une loi antiterroriste, dont les principales victimes risquent d’être les animateurs des mobilisations sociales. 

En Tunisie, les oppositions à ces choix des directions du Front Populaire se sont exprimées dans plusieurs régions, et différents groupes se sont engagés dans une dynamique de construction d’un nouvel outil politique. La difficulté de la tâche semble être immense, les groupes en question étant éparpillés et pour l’instant numériquement faibles. Mais ces militants qui rejettent les illusions institutionnelles, mettent la lutte des classes au centre de leurs préoccupations et n’hésitent pas à dénoncer les trahisons des bureaucraties syndicales, semblent avoir la volonté de se coordonner et pourraient constituer l’embryon d’une future organisation révolutionnaire.



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