SNCF : avec la grève reconductible, tout peut basculer !

Une mobilisation de grande ampleur se construit depuis plusieurs mois à la SNCF : après 3 ou 4 journées de grève réussies et une manifestation nationale regroupant plusieurs milliers de cheminotes et cheminots à Paris le 10 mai dernier, la situation s’accélère cette semaine...

Un appel à la grève reconductible a été lancé pour le mercredi 18 mai, par les fédérations SUD-Rail et FO, ainsi que par des équipes CGT. Des assemblées générales ont donc été convoquées ce mercredi 18 mai afin de discuter de la loi El Khomri et du décret-socle ferroviaire, de la stratégie de lutte, et voter la reconduction de la grève.

Reculer... pour pas sauter ?

La fédération CGT appelle, elle, les cheminots à faire 48 heures de grève tous les mercredis et jeudis, avant un éventuel appel à la grève reconductible, repoussé au mois de juin ! Cet énième report équivaut à refuser la grève reconductible et à mettre des battons dans les roues des nombreux cheminots qui l’attendent impatiemment depuis des mois.

Cette stratégie illustre la logique de lobbying dans laquelle la direction de la CGT cheminots s’est enfermée : laisser passer la loi El Khomri et le décret-socle ferroviaire, pour se contenter de faire un peu pression sur les négociations d’un accord d’entreprise SNCF...

Cette stratégie perdante déboussole de nombreux militants CGT et suscite de forts remous dans les structures : plusieurs syndicats et sections CGT appellent clairement à la grève reconductible le 18 contre l’avis de leur fédération, et d’autres s’apprêtent à les rejoindre si la grève prend de l’ampleur.

La direction tente un coup

Vendredi 13 mai, soit 5 jours avant la grève reconductible, la direction de la SNCF a diffusé partout une nouvelle proposition dans le cadre des négociations pour un accord d’entreprise SNCF. Cette proposition prétend se rapprocher du RH0077 actuel : ainsi, elle annonce le maintien du nombre actuel de jours de repos pour les cheminots. Mais elle contient aussi la possibilité de modifier les horaires de travail jusqu’à 1 heure avant la prise de service, d’imposer aux cheminots des « prises de service délocalisées » dans un rayon de 1 heure de trajet de leur domicile... Avec aussi un éclatement de la réglementation du travail : des règles différentes selon que l’on travaille au fret ou au voyageurs, à Transilien ou en grandes lignes, à l’aiguillage ou à l’accueil... La direction veut diviser !

Surtout, la direction a limité ces propositions à l’accord d’entreprise SNCF (c’est-à-dire aux 150 000 cheminots SNCF) pour en exclure les 5 000 cheminots du privé (et des filiales SNCF). Dans quelques années (5 ans au maximum avec la loi El Khomri), elle se servira de cette « concurrence » et de cette « différence de compétitivité » pour faire du chantage et pour renégocier l’accord d’entreprise vers le bas. C’est pourquoi il faut se battre pour obtenir le maintien de la réglementation actuelle dans le décret-socle.

Cette annonce n’a qu’un but : endormir les cheminots et faire diversion. C’est pour essayer de dégonfler une grève qui s’annonce très forte à partir du mercredi 18 mai. Mais avec une telle annonce, la direction admet qu’elle a peur de l’ampleur du mouvement et qu’elle est prête à tout pour éteindre l’incendie. Avec de tels encouragements, pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? C’est bien la preuve qu’il est possible de gagner le maintien du RH0077 dans le décret-socle.

Y aller pour de bon, maintenant !

C’est donc le moment de se battre, contre la loi El Khomri et contre le décret-socle. Le gouvernement est faible et isolé, et l’utilisation antidémocratique du 49-3 a encore fait monter la colère contre la loi El Khomri. Entre le 16 et le 18 mai, des grèves reconductibles vont commencer chez les routiers, les dockers, dans les raffineries, dans l’aviation, dans la chimie... et le gouvernement craint l’entrée dans la partie des cheminots à partir du 18 mai. C’est donc le moment d’y aller pour de bon : c’est en tapant tous ensemble qu’on peut faire plier ce gouvernement au service des patrons !

Il faut paralyser l’économie, généraliser la grève, et les cheminots ont un rôle important à jouer. Pour cela, il faudra non seulement une grève suivie, mais aussi une grève active : ce n’est qu’en participant activement aux AG, aux manifs, aux piquets de grève... que les grévistes pourront entraîner une majorité de cheminots dans la grève. Et ce n’est qu’ainsi qu’ils pourront contrôler leur grève, et éviter qu’elle ne soit dirigée par des bureaucraties syndicales qui défendent leur intérêts d’appareil avant ceux des travailleuses et travailleurs.

Gabriel Lafleur
dans L'Anticapitaliste n° 337 (19/05/16)

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