Au travail : moins égaux que les autres

L’homophobie et la transphobie entravent la liberté des personnes lesbiennes, gays, bi et transgenres (LGBT), dans de nombreux aspects de leur vie. C’est une forme de censure, d’autant plus forte dans l’entreprise où les travailleuses et travailleurs passent l’essentiel de leur temps : les 2/3 des personnes homosexuelles se cachent par peur des conséquences.

Selon une étude de la Halde en 2008, 85 % des salariés homos ont déjà ressenti un climat homophobe au travail, et 40 % en ont été directement victimes. Lors d’une enquête de l’Agence pour les droits fondamentaux de l’Union européenne en 2013, 20 % des LGBT français ont dit avoir été discriminés à l’embauche ou dans leur emploi, rien que durant l’année précédant leur réponse.

Des discriminations qui ne disent pas leur nom

Si les insultes sont les actes homo­phobes les plus courants, les cas de harcèlement et même de licenciement ne sont pas rares, et les discriminations prennent bien souvent des formes insidieuses et discrètes, par exemple pour l’octroi de congés ou d’avantages aux conjoints. L’homophobie vient parfois de la hiérarchie, mais hélas, souvent des collègues. Elle renforce les divisions, au seul bénéfice des patrons, dans un contexte où les conditions de travail de l’ensemble des salariés se dégradent.

L’article L.1132-1 du Code du travail interdit dans l’entreprise les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle, et l’article 6 de la  loi «Le Pors » sur les droits et obligations des fonctionnaires étend la même protection à ces derniers. Mais l’homophobie est le plus souvent tue par ses victimes, et quand elle fait l’objet de plaintes, elle est rarement sanctionnée. Les patrons savent trouver des prétextes pour justifier des différences de traitement.

Ne pas rester les plus invisibles des invisibles

Cette situation dans le monde du travail a des conséquences en matière de chômage. Une étude, réalisée par Thierry Laurent et Ferhat Mihoubi à partir de données de l’Insee recueillies sur quatorze ans, montre qu’un travailleur homo de moins de 40 ans a deux fois plus de risques de connaître le chômage qu’un hétéro du même âge. « L’existence de pratiques discriminatoires réparties de façon hétérogène dans le monde du travail induit un processus de recherche du “bon emploi” plus difficile et long chez les travailleurs gays que chez leurs homologues hétérosexuels », expliquent les économistes. Contraints à un turnover plus fréquent, les homosexuels se retrouvent plus souvent à Pôle emploi.

Des associations LGBT de divers secteurs professionnels sont réunies dans le collectif Homoboulot. Des syndicats, en particulier la CGT, ont une activité et des instances spécifiques de défense des droits des salariés/ées LGBT. Mais le vécu de l’homophobie et de la transphobie dans les classes populaires demeure pour l’essentiel un « continent noir », une condition vécue souvent dans la solitude et l’anonymat. Il est nécessaire que les travailleurs/euses concernés s’organisent et s’expriment, pour ne pas rester les plus invisibles des invisibles, et pour que d’autres ne parlent pas à leur place. Aux préjugés et aux discriminations, nous opposons l’égalité et la solidarité des travailleurs/euses.

Gaël Klement
dans l'hebdo L'Anticapitaliste n° 295 (25/06/15) 


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